Mon premier amour
écrit par randlog le 13 12 2021
Noël 2012. Un jeune ado traîné par ses parents à la messe aperçoit une porte ouverte donnant sur un escalier au fond de l’église, s’y engouffre, gravit les quelques marches et s’assied. Au moins ici, à la tribune, la vue change un peu de l’ordinaire. Vue dont il ne profitera que peu, puisque lorsque s’élève enfin le chant d’entrée, sa tête se tourne brusquement. Il est assis à côté de l’orgue, qu’il n’avait encore jamais remarqué puisque sa restauration était à peine terminée. Trois ans plus tard, ce serait à lui d’assurer une partie du service de la messe de Noël à cette même console. Le coup de foudre fut immédiat. Aujourd’hui, des années plus tard, le contact de cette console lui manque, après la prépa, les confinements et couvre-feux, la distance entre le platal et l’église où tout a commencé...
Alors qu’il n’aura pu bichonner sa deuxième maison que quelques heures durant ces vacances si courtes, que ce petit texte fasse hommage de ces moments passés à cette tribune, et promesse d’un retour.
Après ce coup de foudre immédiat, la décision ne prit guère de temps. À la rentrée scolaire, j’appris l’orgue. Qu’importe de n’avoir jamais joué de piano, ni apprécié cet instrument.
Des heures y passèrent, des samedis entiers au lycée parfois. Je m’épris de la musique, de la mécanique, de l’acoustique... de l’orgue quoi ! Car oui, l’orgue est une machine complète, alliant la tuyauterie aux écrous, entre les massives pièces de bois du buffet, le meuble, et les délicates vergettes de la transmission.
Parlons très brièvement histoire, que l’on fait ordinairement démarrer au IIIème siècle avant JC avec l’hydraule, sans doute un cousin éloigné et très amusant d’un célèbre acteur maître des arts martiaux du cinéma. Importé un peu plus tard à Rome, il devint un instrument accompagnant les combats et le théâtre, avant de disparaître d’Occident. Réintroduit via Byzance et Pépin le Bref, l’orgue trouva peu à peu un rôle religieux dans l’accompagnement des chants, ce qui lui permettra son incroyable développement. Furent inventées au Moyen Âge de nombreuses prouesses mécaniques, telles que l’abrégé ou les registres, sur lesquelles il serait difficile de s’étendre ici. Les compositeurs et les facteurs rivaliseront d’ingéniosité pour offrir toute sa grandeur à l’instrument, on pourra citer des noms tels que Cavaillé-Coll pour la facture, ou Couperin, Franck et naturellement Bach pour la composition, en oubliant naturellement à peu près tout le monde.
Des siècles d’évolutions pour offrir un instrument monumental, souvent de la taille d’un appartement, faisant corps avec une structure plus grande encore telle qu’une église ou une salle de concert ; une telle variété que la plupart sont uniques, sur le plan mécanique comme sonore ; des possibilités de jeu infinies par la tessiture ou par la polyphonie complexe…
Une myriade d’instruments plus beaux et plus émouvants les uns que les autres, mais un seul premier amour.